Les projets gagnants seront ceux qui démontrent un potentiel de marché garantissant croissance et rentabilité, bénéficient d’une solide capacité opérationnelle à exécuter le plan de développement annoncé et dont les recherches de financement n’hésitent pas à sortir des sentiers balisés.
Si la situation économique est tendue pour de nombreuses PME et startups, les fonds d’investissement n’arrêtent pas d’investir pour autant et des opérations capitalistiques continuent d’avoir lieu. Certes, le nombre de transactions est inférieur en 2020 à celui de 2019 et le montant total levé reste également en deçà de celui observé l’an dernier.
Néanmoins, cet automne 2020, des sociétés comme Ynsect, Kalray, Pigment ou Ankorstore ont clôturé des tours de table de plusieurs dizaines de millions d’euros. Alain Ducasse a quant à lui convaincu l’asset manager Mirabaud Patrimoine Vivant d’entrer à son capital malgré un secteur de la restauration à l’arrêt.
Alors qu’est-ce qui se joue ? Pourquoi et comment certaines entreprises arrivent à convaincre les investisseurs ? Qu’en retenir ?
Avoir des preuves attestant de son potentiel marché
Les entreprises qui tirent leur épingle du jeu partagent toutes trois critères. Premièrement, toutes ont démontré la pertinence de leur business model : elles ont prouvé leur capacité à rencontrer un marché, à générer du chiffre d’affaires et à être rentable à moyen terme. « Fly to quality » comme on dit dans le secteur.
Avoir une bonne idée ou un concept génial et super innovant ne suffit pas, il faut rencontrer un marché et démontrer par un POC qu’on sera en mesure de transformer le potentiel annoncé en revenus. On peut à ce titre évoquer Ynsect qui, avec sa ferme d’insectes installée dans le Jura, annonce des contrats déjà signés avec plusieurs clients significatifs comme Torres, Skretting, Angibaud, Compo Group pour une valeur estimée à 105 millions d’euros.
Être opérationnellement structuré pour exécuter le plan annoncé
Deuxièmement, ces entreprises ont toutes démontré sur le terrain leur capacité à exécuter opérationnellement la vision et le plan de développement annoncés. Les mesures gouvernementales venant garantir le niveau minimum de trésorerie requis, la prime des levées de fonds ira donc aux PME et startups qui mettront en place la structuration opérationnelle adéquate pour dérouler leur plan, feront preuve d’agilité pour l’ajuster en fonction des évolutions de la crise et se seront dotées de l’équipe idoine pour en piloter l’exécution.
Les décisions prises et les choix managériaux observés au cours des derniers mois seront scrutés car ils donnent des indications sur l’aptitude de l’entreprise et de ses dirigeants à sécuriser l’activité, à prendre des décisions difficiles mais pertinentes face à un contexte changeant fait d’imprévus et à éventuellement opérer des pivots pour garantir croissance et rentabilité. De nombreuses sociétés qui servaient principalement une clientèle d’hôtels et de restaurants ont ainsi opéré avec succès un virage serré vers le BtoC.
Innover dans les schémas de financement
Enfin, les entreprises qui réussissent à lever des fonds n’hésitent pas à aller chercher d’autres sources de capitaux et à les mixer. Aux côtés des acteurs classiques comme les fonds d’investissement, il peut s’avérer pertinent de sortir des sentiers battus et de se tourner vers le crowdfunding, les family offices qui investissement sur des durées souvent très longues ou encore de solliciter des capitaux de proximité auprès d’acteurs régionaux.
Un « bon projet » au sens des fonds se finance toujours
Finalement, même si la croissance économique marque le pas, il y a de l’argent pour financer les projets des PME et startups, voire presque plus qu’il y a quelques temps puisqu’il n’a pas été dépensé du fait de la crise. Les investisseurs de tous profils restent à l’écoute des opportunités. Un bon projet, une entreprise dotée d’un modèle économique solide et équilibré, affichant un réel potentiel de croissance de l’activité et ayant démontré sa rentabilité, trouvera toujours les capitaux nécessaires à son développement. Même, elle fera l’objet d’une âpre concurrence entre les investisseurs pour être celui qui entrera au capital. Car ces derniers restent motivés par la peur de laisser passer de bonnes affaires, ce que les anglo-saxons appellent le FOMO (fear of missing out).
Alexandre Stern, Operating Partner, I&S Adviser