A l’occasion du salon Transfair 2017, Didier Poirier, Responsable du service création transmission de la CCI de Paris Ile-de-France, Jérôme Giroux, Directeur de Forthea et Pénélope Biard, Avocate chez Fidal, ont proposé un atelier sur les 10 phases clés de la reprise d’entreprise.
Le salon Transfair 2017 a été le théâtre d’un atelier instructif sur les 10 étapes structurant le parcours de reprise d’une entreprise.
1) Réaliser un bilan personnel
Reprendre une entreprise est un projet particulièrement ambitieux qui suppose pour le « candidat » de mener en amont une réflexion approfondie sur sa situation actuelle, une sorte d’état des lieux de son profil et de ses motivations.
Il convient alors de revenir sur ses compétences et expériences professionnelles, tout en intégrant la dimension familiale qui s’avère souvent décisive dans le cadre exigeant d’une reprise. Ce bilan personnel sera aussi l’occasion de faire un premier point sur les contraintes et ressources disponibles pour mener à bien le projet entrepreneurial.
2) Formaliser son projet de reprise
Le bilan personnel permet la formalisation du projet de reprise. Cette formalisation est utile pour soi mais également pour optimiser la présentation du projet auprès des différents intermédiaires, à commencer par les financeurs.
Cela prend la forme d’une fiche projet ou fiche « teasing » résumant les grandes lignes de la démarche : le CV du repreneur, ses motivations, ses atouts et objectifs, les axes de la recherche (activité, localisation, taille de l’entreprise convoitée…), les apports personnels, les délais de réalisation puis les références et soutiens éventuels (club de repreneurs, experts-comptables…).
3) Appréhender le marché de la reprise
Chaque année, c’est plus de 185 000 entreprises qui sont proposées à la vente en France. Mais en pratique, malgré ce chiffre alléchant, une fois enlevées les structures qui ne correspondent pas au profil ou à la recherche du repreneur, l’éventail des choix se rétrécit drastiquement… Le marché de la reprise confine donc plus à un « marché de pénurie », selon Didier Poirier.
En outre, il s’agit d’un « marché discret » car à côté des journaux d’annonces et autres bourses d’opportunités, l’essentiel des transactions reposent sur des offres confidentielles, non officiellement déclarées, voire simplement latentes… ce qui induit une démarche de recherche active, de « chasse » de la part du repreneur, qui mobilisera idéalement les services d’intermédiaires.
Il convient également de noter que 90 % des structures proposées à la vente sont des petites entreprises qui comptent moins de 10 salariés.
4) Prendre contact avec l’entreprise cible
Une fois décelée la structure cible, il s’agit d’entrer en relation avec celle-ci. Le premier contact avec le dirigeant est très important. C’est une rencontre humaine avant tout. C’est également un contact métier et un rapport entre deux « cultures business » pas nécessairement identiques.
La visite de l’entreprise cible doit aussi permettre de valider certains éléments du dossier (l’activité, le marché, la clientèle, l’organisation en interne…) puis de sentir, comprendre l’entreprise selon une démarche plus intuitive que systématique, et surtout identifier les motivations et souhaits du vendeur.
5) Analyser l’entreprise
Après le premier contact avec la structure cible, devra suivre une étude plus approfondie de celle-ci. La fameuse matrice SWOT est un outil intéressant à cet égard, qui consiste à isoler les points forts et les points faibles de l’entreprise, les opportunités et les potentialités, les menaces et les risques.
Bon à savoir : il convient à ce stade de garder la tête froide et prendre garde au danger d’un éventuel « coup de cœur ». La phase d’analyse sert notamment à cela.
6) Evaluer l’entreprise
Après l’analyse suit la valorisation de la structure. Souvent, le vendeur proposera lui-même un chiffre qu’il conviendra de comprendre.
Les deux méthodes d’évaluation les plus connues pour les reprises d’entreprise sont celle de l’actif net comptable corrigé et celle des multiples. Jérôme Giroux est catégorique à cet égard : « le seul procédé valable pour un repreneur personne physique est la méthode des multiples » qui consiste, non pas à regarder le patrimoine de l’entreprise mais sa rentabilité d’exploitation en rapport avec son endettement éventuel.
7) Négocier la reprise de la structure
La négociation est la phase clé de l’opération. Chaque partie, forte de ses conseils respectifs, a une idée propre de la valeur de l’entreprise et il convient maintenant d’aboutir à un accord final sur son prix et sur les conditions de la vente (avec notamment les modalités de paiement et l’éventuelle garantie d’actif et de passif…).
Il s’agit alors de comprendre les positions et motivations du vendeur et d’être conscient de sa propre marge de négociation. Le rôle des conseils, notamment experts-comptables, est essentiel à cet égard, qui vont s’efforcer de rapprocher les points de vue et d’instaurer un climat global de confiance. L’aspect humain est à nouveau fondamental. Il faut garder le contact avec le vendeur.
La phase de négociation ne doit pas excéder 3 à 6 mois et débouche sur la rédaction d’une lettre d’intention, qui formalise les acquis des pourparlers et prépare le terrain pour la signature ultérieure du protocole d’accord.
8) Le cadre juridique
Au plan juridique, la reprise d’une entreprise peut prendre deux formes : la vente d’un fonds de commerce ou bien celle de titres sociaux.
Reprendre un fonds de commerce consiste à acquérir un ensemble de biens corporels et incorporels, affectés à l’exploitation commerciale, en premier lieu la clientèle (élément essentiel du fonds) mais aussi le droit au bail, les titres éventuels de propriété intellectuelle, le matériel, etc.
En revanche, acheter des parts sociales ou actions revient à acquérir un patrimoine complet, c’est-à-dire tous les actifs et tout le passif – donc les dettes – de la société… D’où l’importance incontournable dans ce cas d’adjoindre au contrat une garantie d’actif et de passif, qui prémunit le repreneur contre toute dette survenant après la vente mais trouvant sa cause préalablement à l’opération.
9) Le protocole d’accord
La signature du protocole d’accord est naturellement une étape clé de l’opération de reprise. Il s’agit selon la définition proposée par Pénélope Biard du « contrat aux termes duquel le vendeur et l’acquéreur s’engagent réciproquement à vendre et à acheter les actions ou les parts d’une société moyennant certaines conditions, notamment de prix, convenues entre elles ».
La présence de conditions suspensives est quasi systématique. La réalisation définitive de la vente supposera donc que certains critères soient remplis, à commencer par l’obtention du financement idoine par le repreneur.
10) Financer la reprise
La rédaction d’un business plan est un préalable essentiel pour emporter des fonds dans le cadre d’une reprise d’entreprise. Il doit être synthétique et embrigadant pour les investisseurs. Il comprend la présentation générale du projet, celle de la structure et du repreneur, le montage juridique et financier et les comptes prévisionnels.
Pour l’essentiel, les financements à la reprise proviendront d’apports personnels, du « love money » (c’est-à-dire l’argent des proches), des prêts d’honneur, des investisseurs financiers, des banques et de Bpifrance.
Hugues Robert