Facture électronique sécurisée : bientôt incontournable ?

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Christophe Milhem, Vice-président de l’Ordre des Experts-Comptables Paris-Ile de France, Président de la commission Innovation et TechnologieChristophe Milhem, Vice-président de l’Ordre des Experts-Comptables Paris-Ile de France, Président de la commission Innovation et Technologie nous livre son analyse sur la facture électronique sécurisée.

L’administration fiscale poursuit et amplifie sa démarche vers le numérique.

Après la généralisation des processus de télédéclarations, le compte fiscal en ligne et le tout nouveau contrôle fiscal des comptabilités informatisées, c’est au tour de la facture électronique de connaître une poussée véritablement phénoménale.

LA PROBLÉMATIQUE DES FACTURES EN GÉNÉRAL ET LA FACTURE ÉLECTRONIQUE

Depuis la nuit des temps, des faussaires en tout genre ont la possibilité de façonner de fausses factures à des fins frauduleuses, tant au détriment du fisc que d’entreprises escroquées.

Avec l’avènement de l’informatique – ordinateur, scanner, imprimante couleur, logiciels de retouche d’images –, produire de fausses factures papier ou fichier (PDF...), indétectables à l’oeil nu est à la
portée de n’importe qui.

Ce qui n’est pas sans poser de réels problèmes à de nombreux acteurs, comme les administrations, les entreprises et, bien sûr et surtout, les professionnels du chiffre : experts-comptables et commissaires aux comptes.

Une facture numérique signée électroniquement permet, à elle seule, de s’assurer que le document est un original authentique, non modifiable et dont l’émetteur est clairement identifié sans le moindre doute. Partant de ce simple constat, les pouvoirs publics entendent la favoriser, voire pratiquement en imposer le recours.
Il existe deux possibilités de générer une facture électronique sécurisée :
- soit par le scellement numérique au moyen d’une signature électronique qualifiée et d’un dispositif de création sécurisé ;
- soit par l’échange sous forme EDI (fichiers structurés complets), cette solution étant actuellement plutôt accessible aux grandes et très grandes entreprises.

La transmission et la mise à disposition des factures électroniques sont soumises à l’acceptation du destinataire, soit préalablement par un document formel (contrat…), soit de manière tacite, par exemple, lorsque le destinataire acquitte la facture.

L’ENVIRONNEMENT LÉGISLATIF ET SON ÉVOLUTION RÉCENTE

La directive européenne 2010/45/EU du 13 juillet 2010, modifiant celle du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA et aux règles de facturation, a été transposée en droit interne par la loi de finances rectificative du 29 décembre 2012 et les décrets d’avril 2013, modifiant les règles sur les factures transmises par voie électronique.

Cette transposition vient d’être complétée par le BOI du 18 octobre 2013, qui impose de nombreux aménagements pour les entreprises, avec de nouvelles règles pour la facture électronique, afin d’en favoriser et d’en simplifier l’usage.

"Les factures électroniques émises et reçues sous une forme électronique, quelle qu’elle soit, tiennent lieu de factures d’origine, dès lors qu’elles sont scellées en recourant à la procédure de signature électronique avancée, réalisée avec un certificat numérique (art. 289‐VI 2° du CGI)".

Ce qu’apporte ce dernier BOI, c’est la reconnaissance de la facture signée électroniquement, avec une signature électronique (qualifiée RGS** et RGS***), en tant que pièce fiscale justificative sans autre document associé.

Ce nouveau texte augure une petite révolution dans les pratiques actuelles, en particulier pour les TPE, qui ne disposent pas toujours de moyens et de procédures avancées.

POUR LES FACTURES NON SÉCURISÉES ÉLECTRONIQUEMENT, LA PISTE D’AUDIT DEVIENT OBLIGATOIRE

Pour toutes les autres factures non électroniques sécurisées, qu’elles soient papiers, ou numériques non sécurisées au sens de la réglementation, les règles fiscales imposent désormais tant à leurs émetteurs qu’à leurs destinataires de mettre en place une piste d’audit fiable.

Le BOFIP du 18 octobre 2013 (BOI-TVA-DECLA-30-20-30-10-20131018) précise à son paragraphe 110 :

"L’authenticité de l’origine, l’intégrité du contenu et la lisibilité des factures doivent être assurées par l’émetteur et par le récepteur. Ces conditions peuvent être assurées, au choix de l’assujetti, par la mise en place de contrôles, établissant une piste d’audit fiable entre une facture et la livraison de biens ou la prestation de services qui en est le fondement, par le recours à la signature électronique avancée fondée sur un certificat qualifié et créée par un dispositif sécurisé de création de signature (signature électronique “ qualifiée ”) ou par l’utilisation de l’EDI répondant aux normes prévues par le CGI."

Cette piste d’audit est définie dans le BOFIP 9113-PGP paragraphe 2, par des contrôles documentés mis en place afin d’établir le lien entre la facture et la livraison de bien ou la prestation de services qui en est le fondement. Et donc d’en valider la valeur probante.

Elle peut être contrôlée à tout moment par l’administration, de manière inopinée.

Sera alors vérifié l’ensemble des informations, documents, données, traitements informatiques ou systèmes d’informations constitutifs de ces contrôles, ainsi que la documentation décrivant les modalités de réalisation.

En cas de manquement relevé à l’issue d’un contrôle, le contribuable dispose d’un délai de 30 jours, à compter de la date de remise ou de réception du procès-verbal, pour formuler des observations ou des
justifications, ou procéder à la régularisation du fonctionnement du système ou de la procédure.

ENTRÉE EN VIGUEUR DES NOUVELLES RÈGLES DE FACTURATION

Ces nouvelles règles sont applicables aux factures émises depuis le 1er janvier 2013. Mais compte tenu des délais d’adaptation nécessaires aux entreprises, il est admis que l’application de ces nouvelles
mesures fasse l’objet, pour les factures émises jusqu’au 31 décembre 2013, d’un examen bienveillant.

Par ailleurs, et par mesure de tolérance une facture créée sur papier, puis numérisée et transmise par informatique pourra, jusqu’au 31 décembre 2014, être considérée comme facture électronique aux deux conditions suivantes :
- sécurisation de la facture numérisée au moyen d’une signature électronique de n’importe quel type ;
- conservation de cette facture aux formats papier et numérique chez l’émetteur (et au format numérique chez le récepteur).

CONSÉQUENCE EN MATIÈRE DE TVA DE L’ABSENCE DE PISTE D’AUDIT OU DE SON ABSENCE DE FIABILITÉ :

La déduction de la TVA par le récepteur de la facture sera remise en cause. En revanche, la TVA facturée sera toujours due par l’émetteur.

COMMENT SE SÉCURISER : LA GÉNÉRALISATION DE LA FACTURE ÉLECTRONIQUE ET LA MISE EN PLACE DE LA PISTE D’AUDIT

La conséquence de cette nouvelle réglementation ouvre aux expertscomptables l’accès à de nouvelles missions d’organisation.

- Pour les clients qui devront, pour des raisons pratiques, continuer à émettre des factures papier, l’accompagnement à la mise en place de procédures et de leur manuel d’application pour valider la piste d’audit selon les impératifs fiscaux (avec par exemple, contrats, bons de commandes, bon de livraison ou de réception de prestation…).
- Pour les clients qui passeront à la facture numérique signée, l’accompagnement en organisation de la chaîne de facturation.

UNE SOLUTION OPÉRATIONNELLE POUR LES EXPERTS-COMPTABLES : SIGNEXPERT

Entre autres fonctionnalités (authentification, signature…), Signexpert inclut une signature numérique qualifiée RGS** ou RGS*** qui est parfaitement éligible à ces nouvelles obligations.

Signexpert permet de sceller électroniquement les factures d’hono-nets de recourir au cachet cabinet qui est également qualifié RG**.

Concernant les clients, il leur faudra acquérir une des signatures numériques disponible sur le marché.

LES GAINS ATTENDUS ET LES CONTRAINTES

La facture numérique signée, outre la sécurité fiscale qu’elle apporte indéniablement, offre de nombreux avantages pratiques et financiers.

Elle peut s’inscrire dans une démarche environnementale, avec la suppression physique du papier, de l’impression, de la mise sous enveloppe et de l’affranchissement. Les factures étant dématérialisées, il ne sera plus nécessaire d’avoir à les numériser et leur transfert et leur traitement en seront facilités par des logiciels adaptés (lecture automatique de documents…).

Les factures électroniques doivent être conservées dans leur forme et contenu originels et être stockées dans la Communauté européenne ou dans les pays liés à la France, par une convention prévoyant une assistance mutuelle ou un droit d’accès en ligne immédiat, de téléchargement et d’utilisation de l’ensemble des données.

Actuellement, et on peut le regretter, peu nombreux sont les éditeurs de logiciels qui ont déjà intégré la signature numérique dans leurs applications en général et dans leurs solutions de facturation en particulier. On peut penser que la prise de conscience par leurs clients des obligations liées à la redoutable piste d’audit, les amènera rapidement à avancer.

Tous les contribuables, et notamment les plus petits d’entre eux, ne sont évidemment pas à armes égales au regard des moyens à mettre en oeuvre.

CONCLUSION

Cette évolution aura des impacts majeurs sur le fonctionnement des entreprises.

Désormais, elles sont confrontées à l’alternative suivante :
- soit la facture est électronique, sécurisée au moyen d’une signature électronique ou d’échange EDI, et porte en elle-même les éléments d’authenticité, d’intégrité, de lisibilité facilement vérifiables, ayant donc une force probante pour tous ;
- soit la facture doit être justifiée au moyen d’une piste d’audit, fiable, documentée et permanente.

Ainsi, il devient infiniment plus simple de produire des factures électroniques que de rester dans un mode papier assorti d’une piste d’audit.

Pour les démarches des entreprises liées à la mise en place des nouveautés sur les factures de toutes sortes, les experts-comptables ont toute leur place pour accompagner leurs clients et pour les aider à se sécuriser, tout en gagnant en efficacité.

Christophe Milhem, Vice-président de l’Ordre des Experts-Comptables Paris-Ile de France, Président de la commission Innovation et Technologie

A propos

francilien84Cet article provient du numéro 84 du Francilien, la revue des experts-comptables région Paris Ile-de-France  qui comprend notamment un dossier sur l'hôtellerie et un dossier sur le financement ainsi qu'un entretien avec Luc Ferry.

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