Interview de Rolland Nino, Directeur Général de BDO et président du groupe de travail sur l'épargne salariale au sein du think tank l'Institut de la Protection Sociale, à propos des évolutions des dispositifs d'épargne salariale contenues dans la loi Macron.
Etes-vous satisfait des modifications apportées par la loi Macron concernant le plan d’épargne collectif pour la retraite (Perco) ?
De manière générale, la loi Macron est venue renforcer l’épargne salariale, avec la démocratisation de la pratique à un plus grand nombre d’entreprises, l’harmonisation et la simplification des dispositifs existants et l’orientation des fonds vers le financement de l’économie. Si le PERCO était déjà un dispositif intéressant, il apparait comme le grand vainqueur de cette réforme, à travers plusieurs améliorations visant à accroitre encore son attractivité.
Par exemple, la contribution employeur de 8.20%pour les versements excédant 2.300 euros par an et par salarié, qui se cumulait par ailleurs avec le forfait social, est désormais supprimée. De même, le forfait social va passer de 20% actuellement à 16% au 1er janvier 2016 pour les sommes issues de l’intéressement, de la participation ou d’un abondement de l’employeur, placées sur un PERCO. Il y a évidemment certaines conditions à respecter mais ces deux mesures sont encourageantes pour une diffusion et une démocratisation accrue du PERCO.
Autre évolution intéressante, l’employeur a désormais également la possibilité d’alimenter le PERCO sous forme de versements périodiques, réguliers. En pratique, ces versements seraient décidés de manière unilatérale par l’employeur, à la différence des abondements actuels corrélés aux versements des salariés. Si les décrets d’application doivent encore préciser les plafonds annuels de ces abondements, cette mesure constitue déjà un vrai signal d’encouragement pour la constitution d’une retraite sur son compte PERCO.
Pensez-vous que ces dispositions vont favoriser la diffusion du Perco, notamment dans les petites et moyennes entreprises ?
Parmi ces améliorations, beaucoup constituent un véritable pas en avant en termes d’accessibilité du PERCO pour tous les types de structures. Les petites et moyennes entreprises vont particulièrement bénéficier de ces simplifications.
Par exemple, dans les entreprises sans délégué syndical ou comité d’entreprise, soit une majorité de TPE/PME, le PERCO se mettait en place à l’initiative de l’employeur. Désormais, à l’instar de ce qui se fait pour le PEE, une ratification aux deux tiers des salariés permettra sa mise en place. En plus d’encourager une forme de participation des salariés dans la gouvernance de l’entreprise, cette évolution a en plus le mérite de simplifier sa compréhension en alignant les règles de mise en place des PEE et des PERCO.
Estimez-vous souhaitable d'aller plus loin dans la simplification et le développement des outils d'épargne retraite ? De quelle manière ?
En effet, les plans d’épargne salariale sont les réceptacles nécessaires des flux d’intéressement et de participation. Ils sont d’ailleurs souvent les premiers dispositifs d’épargne salariale mis en place dans les TPE et PME. Si la loi a considérablement bénéficié au PERCO, des progrès peuvent encore être réalisés pour stimuler un peu plus l’épargne retraite.
Les transferts entre les différents dispositifs de retraite (article 83, PERP, Madelin, Corem, Préfon et CGOS) sont loin d’être fluides. Le PERCO ne permet aucun transfert, depuis ou vers ces dispositifs. Toutefois, dans le même temps, les individus peuvent être amenés à connaître des changements de statut au cours de leur carrière professionnelle. Il faudrait donc que l’épargne retraite accumulée à travers les différents dispositifs, qu’ils soient collectifs ou individuels, corresponde à l’évolution de situation de chacun des individus.
En ce sens, un transfert d’un dispositif à l’autre, à tout moment, serait donc souhaitable tant en termes de simplification que d’incitation à développer les outils d’épargne retraite dans les entreprises. L’ouverture de ces transferts nécessiterait certes un alignement des conditions fiscales entre le PERCO et les autres produits dédiés à l’épargne retraite, mais cela aurait l’avantage d’être beaucoup plus simple à comprendre pour les bénéficiaires. Enfin, la création d’un PERCO individuel, sur lequel transférer son épargne après le départ de l’entreprise, serait également un dispositif stimulant pour le développement de l’épargne retraite.
Propos recueillis par Pascale Breton
Biographie
Directeur général de BDO (conseil, audit et expertise comptable), Rolland Nino accompagne de nombreuses entreprises dans leurs problématiques fiscales et sociales. Il est également membre permanent du conseil d'orientation scientifique de l'Institut de la Protection Sociale, un think tank qui agit comme un laboratoire d'idées pour toutes les questions liées à la protection sociale de l'entreprise. Dans ce cadre, Rolland Nino est le rapporteur du groupe de travail dédié à l'épargne salariale.