Fred de la compta bouleverse les codes du monde du chiffre : digitalisation, automatisation… ubérisation ? Pour en savoir davantage sur ce nouvel entrant qui fascine autant qu’il inquiète, nous avons rencontré Romain Passilly, CEO et cofondateur de Fred de la compta, qui a accepté de répondre à nos questions. Comment se positionne véritablement Fred de la compta sur le marché de la comptabilité ? Quelle est sa vision pour l’avenir et sur les nouveaux enjeux comme l’IA et la blockchain ? Des éléments de réponse ici…
Comment est né Fred de la compta ?
Fred de la compta est né d’un constat d’un manque de connectivité entre les logiciels métiers des entreprises et celui de l’expert-comptable.
Au départ était un cabinet d’expertise comptable spécialisé dans le tourisme, qui existe encore d’ailleurs. Dans ce cadre, je travaillais sur des systèmes d’information dans le secteur du tourisme.
Ce constat d’un manque de connectivité nous a conduit à lancer le concept à l’origine de Fred de la compta. Nous avons produit une plateforme web afin de récupérer à distance les données des clients.
Quel est aujourd’hui votre positionnement, votre stratégie sur le marché de la comptabilité ?
Aujourd’hui, notre positionnement est celui d’éditeur de logiciel pour les cabinets d’expertise comptable. Nous leur proposons ainsi de passer dans l’ère nouvelle du traitement automatique et de la structuration des données.
Les startups de la comptabilité telles que Fred de la compta, semblent pâtir d’une assez mauvaise image auprès des experts-comptables, qui peuvent parler de services bradés, de faible qualité… Quelle est votre réaction à cet égard ?
Nous ne sommes pas une plateforme proposant aux entreprises un service logiciel sans expert-comptable. Il faut savoir qu’un entrepreneur qui vient sur notre site est mis en relation avec un expert-comptable, lui-même utilisateur de notre solution.
Donc la qualité de service proposée est celle du cabinet qui est derrière la plateforme. Nous sommes là pour fluidifier le workflow d’acquisition des données clients. Nous effectuons un traitement automatique de ces données pour faciliter le travail de l’expert-comptable et lui redonner du temps pour accompagner le chef d’entreprise dans des tâches à plus forte valeur ajoutée comme le conseil stratégique.
L’ubérisation est une crainte de la profession comptable. Fred de la compta incarne assez bien cette menace, effective ou non. Votre point de vue est donc particulièrement intéressant sur cette question. Alors, quel est-il ?
Pensez-vous que Cegid ubérise les experts-comptables ? Je ne pense pas. Chacun son métier, le nôtre est de produire des logiciels. Les experts-comptables ont un rapport particulier avec leurs clients, ils ont leurs confidences, c’est là une relation humaine qui n’est pas ubérisable et qui ne le sera jamais. Il ne faut pas voir l’arrivée d’une technologie innovante sur un métier, nécessairement comme un facteur de dérégulation ou comme une menace, mais plutôt comme une opportunité.
La réalité aujourd’hui, c’est qu’il existe une incompréhension du chef d’entreprise sur le coût de production des obligations comptables et fiscales. L’entrepreneur est de plus en plus équipé informatiquement et ne comprend pas qu’il doive dépenser autant d’argent sur ces aspects.
Maintenant, ce que le client ne voit pas généralement, c’est qu’en rémunérant l’expert-comptable, il achète également du conseil. Et nous sommes une solution qui remet en valeur les missions de conseil de l’expert-comptable. Nous aidons les professionnels du chiffre à fluidifier leur production et ainsi à regagner du temps pour les services à plus grande valeur ajoutée. C’est là également une manière de rendre la profession plus attractive auprès des jeunes.
Sur des aspects plus techniques, vous revendiquez le recours à l’intelligence artificielle pour effectuer les opérations de saisie comptable. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce point ?
Notre approche est différente de celle du marché dit de la saisie automatisée. Nous n’avons pas recours aux technologies traditionnelles de pattern recognition [reconnaissance de formes] que peuvent utiliser les acteurs historiques. Nous utilisons une technologie – sur laquelle nous avons nous-mêmes déposé un brevet – qui assoit la confiance à l’égard des données traitées, c’est-à-dire qu’une fois que l’écriture comptable est générée, il n’est plus besoin de la faire vérifier par un collaborateur.
C’est pour cela qu’il y a un vrai gain de temps. On ne contrôle que ce que l’IA n’est pas parvenue à traiter.
Quel est votre regard sur les autres technologies émergentes comme la blockchain notamment ? Pensez-vous investir dans ce domaine ?
Nous sommes attentifs à la blockchain, forcément. Nous avons fait des tentatives mais il n’est pas facile de trouver des utilisations pratiques à cette technologie. Nous avons un petit groupe de travail qui réfléchit sur le sujet mais pour l’heure, nous sommes encore au stade de l’avant-projet.
Pour finir, quels sont les projets de développement de Fred de la compta pour l’avenir ?
La dernière levée de fonds que nous avons effectuée servira plutôt à pérenniser l’aspect fonctionnel de notre solution pour véritablement, devenir un ERP complet pour cabinets d’expertise comptable.
Egalement, nous mettons très en avant l’aspect marketing chez Fred de la compta. Notre logique n’est pas uniquement logiciel mais nous réfléchissons aussi à de nouveaux écosystèmes de travail et à des stratégies digitales innovantes. Les cabinets comptables ont beaucoup de mal à faire de la croissance organique. Nous leur montrons que nous pouvons les accompagner sur ce point puisque chaque mois, nous recevons 500 leads qualifiés avec nos actions. C’est une expertise que nous pouvons transmettre aux experts-comptables utilisateurs de notre plateforme.
Propos recueillis par Hugues Robert