Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Roland Lescure, ministre délégué chargé de l'Industrie et de l'Énergie et Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation, ont présenté le mercredi 24 avril le « plan d’action : simplification ! ». Ce plan a pour ambition de simplifier le quotidien des entreprises pour gagner leur confiance et les motiver à créer de la richesse.
« Ce projet de loi sur la simplification, qui est davantage un plan puisqu'il comporte des mesures réglementaires, part d'un diagnostic sur la croissance en France et en Europe. Trop de normes tue la croissance. Le coût a été évalué par le Sénat. La surcharge administrative représente environ 84 milliards d'euros de perte de production en France, 3 % du PIB. Trop de normes tue donc la croissance. Trop de normes découragent les entrepreneurs. Trop de normes nous font courir le risque d'un déclassement économique européen par rapport à la Chine et aux États-Unis. Et c'est probablement un des enjeux économiques les plus importants des décennies à venir que de rattraper la productivité européenne par rapport à la productivité américaine », a expliqué Bruno Le Maire à l'occasion de la conférence de presse de présentation du plan de simplification pour justifier les 50 mesures du gouvernement contenues dans ce plan.
Réduire et rationaliser le stock de normes
Mener une évaluation régulière des normes adoptées
De même qu’ont été lancées des « revues de dépenses » en matière budgétaire, des « revues de normes » seront lancées dès 2025.
Ces travaux nourriront notamment les lois annuelles de simplification
Rationaliser le droit en vigueur
Des chantiers de simplification du droit existant ont été engagés par le Conseil d’Etat à la demande du Premier ministre.
Un chantier spécifique de rationalisation et d’allègement du code de commerce sera engagé dès 2024, dans l’optique de le diviser par deux à horizon 2027.
Un premier travail d’analyse du Code du commerce vient d’être engagé par le Conseil d’Etat à la demande du gouvernement. En lien avec le ministère de la Justice, une commission dédiée sera ensuite mise en place au 1er semestre 2025, avec des groupes de travail spécialisés.
L'objectif est de renforcer la lisibilité du droit à droit constant (rationaliser, délégaliser, supprimer la norme superflue à tous les niveaux de norme) et simplifier en repensant les dispositifs pour désurtransposer, déréguler ou simplifier ce qui peut l’être. Elle fera sous 18 mois des propositions pour alimenter un projet de loi visant à simplifier ce code. Si cette méthode fait ses preuves, elle pourra ensuite être répliquée à d’autres codes.
Assurer une simplification durable
Instaurer des lois annuelles de simplification des normes applicables aux entreprises
Comme en matière de finances publiques et sociales, une loi sera préparée chaque année pour simplifier le droit en vigueur applicable aux entreprises.
Des « pilotes simplification » seront désignés au sein de chacune des directions d’administration centrale productrices de normes ou de démarches pour les entreprises. La communauté de ces référents sera animée par la Direction interministérielle de la transformation publique.
Ce projet de loi de simplification annuelle sera aussi alimenté par France Expérimentation (dispositif DITP-DGE existant, saisi par les entreprises) et France Simplification (dispositif créé lors du CITP du 23 avril 2024, saisi par les préfets).
Instaurer un test PME
Créer un test pour faire en sorte que l’impact sur les entreprises, et en particulier les PME, soit systématiquement pris en compte pour l’élaboration des normes qui les concernent. Ce test PME doit permettre que les normes fassent désormais l’objet d’une évaluation tant quantitative que qualitative en termes d’effets sur l’économie.
Limiter la « comitologie »
Une vingtaine de comités seront supprimés dès cette année. Cet exercice aura lieu chaque année pour assurer de la pertinence de chaque commission.
Alléger les contraintes qui pèsent sur l’organisation des entreprises
Un bulletin de paie simplifié
Un nouveau bulletin de salaire d’une page va être établi avec les partenaires sociaux d’ici 2027, avec un nombre cible de quinze lignes. Il présentera les principaux agrégats composant la rémunération, sans le détail des prélèvements sociaux réalisés. Une mise à disposition systématique par l’employeur des informations nécessaires à la reconstitution des montants qui figurent sur le bulletin restera toutefois prévue pour le salarié.
Simplifier et dématérialiser la gouvernance des entreprises
La proposition de loi sur le financement des entreprises et l’attractivité de la France envisage que l’ensemble des réunions des conseils et des assemblées générales soit organisé de manière dématérialisée ou en hybride, et dans un cadre juridique sécurisant.
Moins de démarches lors d’une fusion ou d’un rachat
- Relèvement de 75 % des seuils de notification obligatoire de 150 M€ à 250 M€ de chiffre d’affaires mondial consolidé, ou 50 M€ à 80 M€ pour le seul marché français.
- 25 à 30 % d’opérations seront ainsi allégées, sans pour autant exonérer de ce contrôle les opérations de concentrations pouvant porter atteinte à la concurrence.
- Les seuils spécifiques à l’outre-mer ne sont pas modifiés.
Limiter le risque contentieux et les différends
Révision des sanctions applicables aux chefs d’entreprises
Le plan prévoit de supprimer la peine d’emprisonnement de deux ans pour le remplissage erroné du registre des bénéficiaires effectifs (RBE), Ce registre restera un document obligatoire à fournir à l’administration fiscale. Des sanctions financières dissuasives seront maintenues. Il prévoit aussi de supprimer la peine d’emprisonnement lorsqu’il est fait obstacle à la mission de certification des informations de durabilité (directive CSRD) tout en maintenant des sanctions en la matière. Une mission interministérielle doit permettre d’identifier des pistes de travail en matière de « dépénalisation ».
Généralisation de la médiation
Les dispositifs de médiation entre les entreprises et les administrations vont être élargis à tous les ministères.
L’ouverture de la médiation avec l’administration interrompra les délais de recours afin de donner toute sa chance à ce mode de résolution des différends.
Accélérer le traitement des recours contentieux devant la juridiction administrative
Il est également prévu de favoriser le recours aux magistrats honoraires et simplifier les conditions pour exercer les fonctions de juge des référés, qui est le juge de l’urgence. Cette mesure devrait permettre de fluidifier et d’accélérer le traitement des requêtes et des référés, la mise en œuvre des enquêtes publiques et l’exécution des décisions juridictionnelles des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel.
Réformer le droit des contrats spéciaux
Le droit des contrats spéciaux fixe les règles spécifiques à certains contrats tels que les contrats de vente, d’entreprise, de location, de prêt ou de mandat. Ces règles spéciales datent pour l’essentiel du code Napoléon de 1804. Le gouvernement souhaite réformer le droit des contrats spéciaux, dans un délai de deux ans.
Les principaux contrats concercnés seront : la vente, l’échange, le louage d’ouvrage ou contrat d’entreprise, le bail ou contrat de location, le prêt, le dépôt et le séquestre, les contrats aléatoires et le mandat.
Simplifier les démarches administratives des entreprises
Supprimer tous les formulaires Cerfa
Un Cerfa est un document normalisé qui permet de procéder à des démarches auprès de l’administration.
Il en existe dans tous les domaines, sous forme de formulaires, courriers, carnets : urbanisme (déclaration préalable de travaux, permis de construire, permis de démolir), droit du travail, droit des sociétés, santé (carnet de santé, feuille de soins).
Un tiers de ces formulaires sont à destination des entreprises, deux tiers des citoyens.
La numérisation et la mise en place de démarches en ligne rationalisées a permis de désactiver plus de 3 000 formulaires mais a minima 1 800 sont encore actifs.
Le plan prévoit de supprimer tous les formulaires Cerfa d'ici à 2030, 80 % d'ici à 2026.
Moins de demandes d’autorisations obligatoires
Toute démarche qui n’aura pas prouvé son utilité ou ne sera pas imposée par le droit européen ou international sera supprimée.
Un maximum d’autorisations sera transformé en simples déclarations.
Les déclarations inutiles seront supprimées.
Accès unique aux démarches des entreprises dans un « espace entreprise »
Un « espace entreprise » offrira un accès unifié à toutes les démarches administratives et subventions d'ici à 2030.
Au sein de cet espace sera mis en place un coffre-fort de données, pour faciliter la mise à jour des données et leur transmission à l’administration, à la main de l’entreprise. L’utilisation d’outils d’intelligence artificielle permettra la mise à disposition de l’entreprise d’une information personnalisée.
Reprise ou cession d’une entreprise
En matière de cessions d'entreprise, le principe de l’information sera conservé afin de permettre aux salariés de s’organiser pour reprendre l’entreprise. Le délai d’information préalable sera toutefois ramené à 1 mois et les amendes en cas de non-respect plafonnées à 0,5% du montant de la vente pour les entreprises de moins de 50 salariés pour accélérer les reprises et alléger les formalités.
S'agissant de la reprise d'une entreprise, nn guide du repreneur sera mis en place pour les accompagner.. Un « guichet conformité – reprise » sera créé à Bercy pour faciliter la mise en conformité au moment de la reprise et permettre à l’entrepreneur de solliciter des visites de conformité ou des visites conseils de la part des différentes administrations.
Simplifier l’accès à la commande publique
D’ici à 2028, l’ensemble des marchés publics de l’Etat, de ses opérateurs, des hôpitaux et des organismes de sécurité sociale passeront par cette plateforme unique « Place ». Les collectivités pourront rejoindre volontairement cette plateforme. Les sites des collectivités seront en outre rendus « interopérables », c’est-à-dire qu’il sera possible de naviguer facilement entre eux.
Le plan prévoit également de simplifier le processus de candidature aux marchés publics. Dès 2026, une entreprise pourra remplir une candidature en utilisant uniquement son SIRET. C’est l’administration qui ira rechercher les informations déjà transmises, conformément au principe du « dites-le-nous une fois ».
Accompagner pour moins sanctionner
Développer les rescrits et les mettre à disposition du public
La pratique des rescrits sera développée, permettant de délivrer aux entreprises et aux fédérations professionnelles une interprétation du droit en vigueur opposable à l’administration. Un recueil mettant à disposition du public des rescrits, fiscaux et non fiscaux sera disponible dès 2024. Ils seront opposables à l’administration. Plusieurs centaines de rescrits de portée générale anonymisés y seront versés dès cette année.
Simplifier et clarifier le traitement fiscal et social des avantages en nature et frais professionnels
Une nouvelle concertation sera lancée en 2024 pour recenser l’ensemble des préoccupations et propositions des entreprises et définir ensemble un cadre rénové des règles d’évaluation des avantages en nature et frais professionnels. Elle traitera prioritairement le cas des cadeaux distribués dans le cadre professionnel.
Cette revue de la règlementation visera à une convergence entre la doctrine fiscale et sociale.
par Arnaud Dumourier