TVA facturée à tort : manquement au devoir de conseil de l'expert-comptable

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Comment apprécier le préjudice subi par la société dont l'expert-comptable a laissé facturer une TVA pour ses activités qui en étaient exonérées ?

Une société ayant pour activité l'enseignement à distance et la correction de copies d'examens blancs et des corrections d'examens oraux blancs pour des collèges et lycées, a fait assigner son expert-comptable en responsabilité, invoquant un manquement à une obligation de conseil.
La cliente reprochait au cabinet comptable, lequel déposait ses déclarations périodiques de chiffres d'affaires et de résultat ainsi que ses déclarations mensuelles de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), de ne pas l'avoir informée de ce que ses activités de correction de copies et d'oraux d'examens blancs étaient exonérées de la TVA.

La cour d'appel de Versailles a condamné l'expert-comptable à payer à sa cliente 26.614 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour un trop-versé de TVA entre le 15 mai 2014 et le 31 décembre 2015 mais a refusé d'admettre un préjudice de perte de chance pour les années 2012 et 2013, au motif qu'il n'était pas établi que la position de l'administration fiscale prise en 2014 eût pu avoir une application rétroactive.
Après avoir énoncé que la réparation d'un préjudice doit replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable ne s'était pas produit et constaté que l'expert-comptable avait manqué à son devoir de conseil en laissant la société facturer une TVA pour ses activités qui en étaient exonérées, ce qui s'était traduit par un surcoût de ses prestations au regard de celles proposées par ses concurrents et avait affecté sa compétitivité, les juges du fond ont retenu que la société ne pouvait assimiler à une marge dont elle aurait été privée, la TVA qu'elle avait trop versée.
Les juges ont retenu que la société avait néanmoins été contrainte, afin de s'aligner sur ses concurrents, de réduire ses marges à raison de l'application d'une TVA indue et que son préjudice devait être évalué en appliquant aux chiffres d'affaires retenus, l'augmentation du chiffre d'affaires qu'elle a réalisé lorsqu'elle avait n'a plus facturé de TVA à ses clients, et y appliquer son taux de marge calculé à partir du résultat d'exploitation rapporté à son chiffre d'affaires.

Dans un arrêt du 19 juin 2024 (pourvoi n° 22-19.532), la Cour de cassation considère qu'en l'état de ces énonciations et constatations, la cour d'appel a souverainement apprécié le préjudice subi par la société. Elle rejette le pourvoi.